La broderie d’or en Chine
La broderie d’or trouve ses origines dans la Chine Ancienne et a voyagé en Europe grâce aux marchands de soie. En Chine, l’utilisation des couleurs et des matières était strictement réglementée. La broderie d’or était réservée aux vêtements de cérémonie, notamment les tuniques, les marques hiérarchiques, et les vêtements impériaux. Les fils d’or étaient brodés en spirales pour représenter des dragons, des oiseaux et des monstres, ou posés par paires en lignes fines pour créer des nuages stylisés ou mettre en valeur les broderies de soie.
La broderie d’or se répand dans le monde
Des passages de l’Ancien Testament décrivent les techniques de fils d’or travaillés sur du lin. Progressivement, la broderie d’or s’est répandue au Moyen-Orient, utilisée tant à la cour que pour les ornements de cérémonies. Tyr est devenu le centre de la broderie d’or et de son commerce, contrôlé par les Byzantins.
Cette technique a continué son voyage à travers l’Afrique du Nord et l’Espagne, atteignant l’Europe de l’Ouest, les Îles britanniques, la Scandinavie, et l’Amérique du Nord.
Opus Anglicanum
L’apogée de l’Opus Anglicanum
La popularité de cette technique parmi l’aristocratie et le clergé a conduit à une maîtrise de plus en plus raffinée et à une richesse croissante des points et motifs. « Opus Anglicanum » signifie « Ouvrage à l’anglaise » et se réfère à la production anglaise des XIIe-XVe siècles, en particulier les broderies ecclésiastiques.
Les principales caractéristiques de l’Opus Anglicanum sont les scènes religieuses figuratives, brodées principalement au point fendu (fils de soie), ainsi que l’utilisation importante de la couchure à l’arrière du tissu pour le fond. Cette technique de couchure à points invisibles, apparue au milieu du XIIe siècle, consistait à tirer le fil décoratif à l’arrière du tissu pour qu’aucun point ne soit visible sur le devant, assurant ainsi une grande fluidité aux vêtements.
Les premières pièces d’Opus Anglicanum
Les plus anciennes pièces d’Opus Anglicanum conservées sont une étole et une manipule de St Cuthbert, datant de 901 et 916, conservées à la bibliothèque de la cathédrale de Durham. Réalisées sur ordre de la reine Aelfflaed pour l’évêque de Winchester, ces pièces présentent des personnages, feuillages et lettrages brodés au fil de soie le plus fin, avec des fonds et auréoles en fils d’or.
L’Opus Anglicanum a connu son apogée entre 1250 et 1350. À cette époque, la simple mention d’une œuvre travaillée par des mains anglaises suffisait à prouver sa haute valeur. Un inventaire du Vatican de 1295 recense plus de 110 pièces réalisées avec cette technique.
Or nué – une invention italienne
Vers la fin du XIVe siècle, les ateliers anglais ont perdu de leur popularité au profit des ateliers d’Italie, de France et des Pays-Bas. Une nouvelle technique italienne, l’or nué, s’est développée au début du XVe siècle, surpassant bientôt toutes les autres techniques de broderie d’or en Europe. L’or nué impliquait la pose de deux fils d’or sur le tissu, fixés par des fils de soie de couleur pour créer des motifs complexes. Cette technique permettait de simuler très finement la peinture.
Un exemple spectaculaire d’or nué
L’œuvre la plus remarquable en or nué du Moyen Âge est un vêtement sacerdotal de l’ordre de la Toison d’or, conservé dans le Trésor de Hofburg à Vienne. Les visages et les mains des personnages sont brodés avec des fils de soie d’une grande finesse, tandis que leurs habits et le fond sont réalisés en or nué. Après la réforme lancée par Henri VIII, de nombreuses œuvres ont été démontées pour récupérer l’or et les pierres précieuses.
Nouvelles techniques pour broder l’or
À partir du XVIIe siècle, les techniques de fabrication de fils de métal ont évolué. Les fils d’or ou dorés sont devenus si fins qu’ils pouvaient traverser les tissus, donnant naissance à de nouvelles techniques de broderie de surface et de dentelle, en plus de la couchure traditionnelle. Les fils d’or et d’argent étaient souvent combinés à la broderie noire et à la broderie de soie.
L’évolution de la broderie d’or au XVIIIe siècle
Au XVIIIe siècle, la mode offrait de plus grandes surfaces pour la broderie, tant sur les vêtements masculins que féminins. Les motifs devenaient plus naturalistes, avec de larges fleurs brodées aux fils de soie et d’or. Au XIXe siècle, la broderie d’or a perdu de sa popularité, sauf dans la haute couture. Le mouvement Arts & Crafts, concurrent de l’Art Nouveau, a permis de préserver ces techniques, avec des motifs créés par des artistes comme William Morris et Edward Burne-Jones.
Renaissance de la broderie d’or moderne
L’utilisation de fils dorés au lieu de fils d’or pur a relancé cette technique, la rendant accessible à tous. Les artistes modernes jouent avec ces nouveaux matériaux pour créer des motifs variés, allant de l’abstrait à l’épuré. La broderie d’or reste l’une des techniques les plus longues à réaliser, mais son effet spectaculaire et ses nombreuses applications lui ont permis de retrouver une place importante dans les ateliers et chez les particuliers.