logo letemps de broder

Teinture Sauvage

Depuis quelques mois, les photographies de Teinture Sauvage sur Instagram me captivent par leur qualité exceptionnelle. Elles dégagent une harmonie profonde entre la photo et son sujet. Malgré un emploi du temps chargé, Céline m’a accordé quelques heures pour parler de sa passion.

Il y a dix ans, Céline et son mari ont acheté une maison en ruine à la campagne. Son travail de juriste et ses heures passées devant l’ordinateur devenaient de plus en plus pesantes, surtout qu’elle éprouve un besoin vital de créer de ses mains. Les plantes, notamment les plantes sauvages et médicinales, ont toujours fait partie de sa vie. Elle commence à expérimenter la couleur végétale avec les plantes de son jardin, puis suit une formation de plusieurs semaines. Le virus est pris. En 2017, Teinture Sauvage voit le jour, avec l’ambition d’offrir des fils teints exclusivement avec des plantes.

Les secrets de la teinture végétale

Les propriétés tinctoriales des plantes

Les plantes sont composées de divers produits chimiques, dont certains possèdent des propriétés tinctoriales. Les fibres naturelles comme le lin, la laine et la soie doivent être plongées dans plusieurs bains à des températures variées pour se colorer. Certaines plantes, comme le curcuma, l’avocat et le noyer, se lient directement aux fibres sans nécessiter de mordant.

Le mordançage

La plupart des autres plantes requièrent un mordant. Le mordançage est la première étape du processus de teinture, permettant de créer une affinité entre le colorant de la plante et la fibre. Traditionnellement, des sels d’aluminium ou d’alun sont utilisés. Cependant, ces sels proviennent d’un minerai, l’aluminium, dont l’exploitation est néfaste pour l’environnement. Céline a choisi de ne pas utiliser de sels d’alun pour rester cohérente avec sa démarche écologique. Elle expérimente des solutions alternatives, utilisant des plantes locales comme mordant.

Une approche expérimentale

Céline, bien qu’amatrice, se lance dans de nombreuses expériences. Avec des outils simples, parfois bricolés, elle crée des décoctions variées, joue avec les températures et le nombre de bains. Elle utilise l’eau de pluie, collectée dans une grande cuve en ciment, car elle est plus douce. Les récipients utilisés sont en inox ou des faitouts en aluminium recyclés, car ils n’affectent pas les réactions chimiques. En plus de sa petite production et de la cueillette sauvage, elle achète des plantes chez un herboriste ou dans des boutiques spécialisées.

Une filière en plein essor

Ces dernières années, Céline a constaté une augmentation du nombre de cultivateurs de plantes tinctoriales, tels que l’indigo, la garance et la gaude. La filière de la teinture est longue et complexe, allant de la culture des plantes et de l’élevage des animaux à la réalisation de pièces tissées ou brodées. Chaque étape nécessite des spécialistes, qu’il est crucial de préserver.

Un quotidien rythmé par la nature

Un atelier à ciel ouvert

Une petite grange abrite le matériel pour les bains, mais elle est ouverte aux quatre vents, rendant le travail difficile en hiver. Céline aime toucher les fibres, ce qui l’aide à juger de son travail. Ses mains sont souvent colorées, et lorsqu’elle se brûle, elle accepte de porter des gants, bien qu’elle aimerait en trouver qui protègent tout en permettant de sentir les fibres.

Une activité dépendante du temps

Le travail de teinture dépend fortement des conditions météorologiques et du temps qui passe. Il est difficile de planifier le travail à l’avance, et compter ses heures reste un rêve pour Céline. Entre la préparation des décoctions d’herbes, les bains et le lavage des fibres, le travail est très physique et nécessite des conditions météo favorables. Travaillant seule, toute son activité dépend du soleil et de la pluie.

L’atelier intérieur

En plus de la grange, Céline dispose d’un atelier dans sa maison pour les jours de pluie. Elle y prépare ses commandes, y prend ses magnifiques photos et gère sa vitrine virtuelle sur Instagram, où elle compte plus de 11 000 abonnés. Certaines boutiques, comme Loop London, commencent à vendre ses produits.

Une artiste dans l’âme

Céline aime jouer avec les couleurs, observer la couleur monter sur la fibre et explorer les possibilités offertes par chaque plante. Elle ne souhaite pas « teindre à façon », c’est-à-dire recevoir des commandes pour des couleurs spécifiques. « Je ne cherche pas une couleur en particulier mais ce que peut offrir une plante », dit-elle. Cela révèle l’âme d’une artiste en elle.

Aujourd’hui, Céline a quitté son travail de juriste pour se consacrer entièrement à ses teintures. Depuis juillet, elle propose des kits pour apprendre à teindre ses fibres, ainsi que des assortiments de fils à broder. Elle privilégie les fibres locales et de fabrication française, offrant aux brodeuses des matières premières uniques et de haute qualité.

Ces articles qui pourraient vous plaire