Les métiers à broder sont essentiels pour tendre le tissu destiné à la broderie. Bien que certains points puissent être réalisés sans tendre le tissu, d’autres en dépendent. La question de l’existence et de la forme des métiers à broder s’est posée dans le cadre de la broderie historique et de la reconstitution d’ateliers de brodeurs. Existaient-ils réellement ? Quelle était leur forme ? Comment étaient-ils fabriqués ?
Exploration des sources historiques
Pour répondre à ces questions, j’ai exploré des sources historiques jusqu’au 18ème siècle, période marquée par l’arrivée du tambour à broder rond. J’ai documenté son apparition sans étudier son évolution, réservant cette analyse pour un article séparé. Les sources consultées incluent des représentations visuelles, des traités et des broderies elles-mêmes, chacune apportant des informations précieuses malgré leurs limites.
Représentations visuelles
Les représentations visuelles attestent de l’existence des métiers à broder à certaines époques, mais elles ne sont pas toujours suffisantes pour identifier avec certitude les outils ou leurs caractéristiques techniques. Par exemple, une enluminure du 14ème siècle présente une scène qui pourrait représenter de la broderie, bien que cela reste incertain.
Traitements écrits
Certains traités fournissent des précisions sur les pratiques de l’époque. Le « Libro dell’Arte » de Cennino Cennini, par exemple, indique que la toile doit être tendue sur un châssis par le brodeur lui-même. Ce détail confirme l’utilisation de métiers à broder au Moyen Âge.
Étude des broderies
L’analyse des techniques et des points utilisés dans les broderies historiques offre des indices supplémentaires. Les couchures, notamment, nécessitent souvent un tissu tendu, indiquant l’usage de métiers à broder pour certaines techniques complexes comme la broderie d’or.
Définitions et terminologie
Un métier à broder est un cadre, posé ou sur pieds, sur lequel le tissu est tendu pour être brodé. Les cadres les plus simples sont en bois, certains comportant des systèmes pour attacher le tissu et régler la tension. Les techniques pour tendre le tissu varient selon les époques, les régions et les contextes de broderie.
Moyen-Âge
Les premières représentations de brodeurs et brodeuses au travail datent de la fin du Moyen Âge. Une enluminure du 14ème siècle montre un cadre sur des tréteaux, potentiellement un métier à broder. Une fresque de Francesco Del Cossa, vers 1470, offre une représentation plus claire, avec un cadre assemblé par mortaise et chevilles.
Le « Libro dell’Arte » de Cennino Cennini, daté de la fin du 14ème siècle, mentionne que la toile doit être tendue sur un châssis par le brodeur, confirmant l’utilisation de métiers à broder à cette époque. Les couchures, particulièrement, nécessitent un tissu tendu pour des résultats optimaux.
Points de broderie et techniques
Les points comme le point fendu et le point de chaînette peuvent être réalisés sans tendre l’ouvrage, mais les couchures, utilisées sous différentes formes (point de Bayeux, point de couvent, point de Boulogne), nécessitent souvent un tissu tendu, surtout pour la broderie d’or.
Renaissance
Aux 16ème et 17ème siècles, les représentations de brodeurs et brodeuses deviennent plus nombreuses. Certaines gravures montrent des ateliers de broderie avec divers outils et leur organisation. Les métiers sont souvent assemblés par mortaise et tendus des quatre côtés par un fil.
Gravures et ateliers
Une gravure montre un brodeur travaillant sur un cadre posé sur une table spécifique, avec des outils disposés autour. Une autre gravure représente une brodeuse domestique utilisant un cadre réglable avec un système de mortaise.
18ème siècle
Au 18ème siècle, des ouvrages comme « L’Encyclopédie » de Diderot et d’Alembert et « L’art du brodeur » de M. de Saint-Aubin fournissent des descriptions détaillées des métiers à broder et de l’organisation des ateliers.
Construction des métiers
Les métiers de cette époque sont réglables en largeur grâce à des chevilles ou des clous. Le tissu est tendu sur une pièce de toile fixée sur les ensouples, un système encore utilisé aujourd’hui.
Extraits de L’Encyclopédie
Voici un extrait détaillant un atelier de brodeur :
- Le métier est composé de deux ensouples et de deux lattes.
- L’étoffe est bordée d’un gallon de toile bien cousu, attaché aux lisières des ensouples et tendu par des ficelles.
Perspectives
Cet article synthétise plusieurs années de recherches sur la broderie historique. Il était crucial, pour la reconstitution d’un atelier de brodeurs, de disposer d’un matériel historiquement correct. Si l’apparition des métiers à broder reste difficile à dater, leur utilisation est antérieure aux premières représentations visuelles. Les descriptions précises des techniques et des procédures apparaissent surtout à partir du 18ème siècle, avec des ouvrages comme « L’Art du brodeur ».
Pour compléter cette recherche, un tableau Pinterest dédié aux métiers et tambours à broder historiques est régulièrement mis à jour avec de nouvelles représentations et informations.