Nadine Chaminand – Brodeuse de coiffes bigoudènes

26/05/2020

En Bretagne, une brodeuse a repris les anciennes techniques pour réaliser les superbes coiffes traditionnelles blanches et légères. Dans ce premier article, elle nous raconte son parcours. Dans le suivant, elle nous décrit les étapes pour broder et confectionner une coiffe. Bienvenue en pays Bigouden!

Texte de Nadine Chaminand. Photos ©Tristan et Nadine Chaminand

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Toute petite, j’ai été attirée par les travaux d’aiguilles, quels qu’ils soient, à partir du moment où les religieuses me les ont fait découvrir à l’école ; le tricot et le crochet à 6 ans, puis quelques points de broderie, et ensuite la couture. Tout me passionnait, surtout la couture, à tel point qu’à l’adolescence j’envisageais d’être couturière, au grand désespoir de mes parents qui voulaient que je continue mes études car j’étais bonne élève.
La couture a donc été reléguée au stage de hobby ; elle l’est toujours occasionnellement. Ce n’est finalement que tardivement, vers l’âge de 25 ans, que j’ai réellement découvert la broderie, grâce à un entrefilet dans la presse, qui annonçait des stages de broderie au Musée Breton de Quimper : une technique différente était enseignée un samedi/mois. Je me suis empressée de m’inscrire à tous les stages, et c’est à l’occasion de l’un d’entre eux que j’ai fait la connaissance de Pascal Jaouen, un an ou deux avant la création de son école de broderie d’art.

Ayant particulièrement apprécié sa façon d’enseigner, j’ai suivi ses cours à partir de 1995, année de la création de son école. Un an et demi plus tard, il me demandait d’assurer les cours à Brest où il ouvrait une seconde école. J’étais à ce moment-là en disponibilité de la Fonction Publique, donc j’ai accepté pour une période de 2 ans, puis suis redevenue élève, car on n’a jamais fini d’apprendre ! C’est à ce moment-là qu’avec son aide, j’ai réalisé ma première coiffe bigoudène sur la demande d’une petite cousine qui faisait de la danse traditionnelle dans un groupe du Pays Bigouden. A partir de là, les commandes se sont enchaînées et,  parce qu’il fallait bien trouver de l’inspiration pour de nouveaux modèles, j’ai commencé à m’y intéresser de plus près en passant du temps au musée et en faisant du collectage dans mon entourage. Michel Bolzer, collectionneur et repasseur de coiffes très connu sur le Pays Bigouden, m’a également apporté une aide très précieuse, en me faisant profiter de son savoir et en m’encourageant sans cesse.

Petite coiffe sur tulle, époque 1900.
Coiffe sur tulle des années 1940 (copie d’une ancienne)

Mes deux grands-mères étaient bigoudènes et portaient la coiffe, mais lorsque quelque chose fait tellement partie de votre quotidien, vous n’y prêtez pas plus attention que cela. Et elles n’étaient malheureusement plus de ce monde lorsque j’ai commencé à m’intéresser aux coiffes. Mon plus grand regret sera toujours de ne pas avoir pu broder une coiffe à l’une de mes grands-mères.

Les Grands-Mères et leur coiffe

A ce jour, j’ai réalisé environ une centaine de coiffes en 20 ans, toutes époques confondues. La coiffe bigoudène, qui est souvent le symbole de toute la Bretagne aujourd’hui, n’a pas toujours été telle qu’on la connaît actuellement. Assez petite à la fin du XIXème siècle (environ 6 cm), elle a grandi, grandi au fil des décennies, jusqu’à atteindre une hauteur maximale de 35 cm dans les années 1950. Dieu merci, elle s’est arrêtée là, car plus les jupes raccourcissaient, plus les coiffes montaient…. Bien entendu, les motifs ont aussi évolué, mais ils ont toujours représenté des thèmes floraux. Il convient donc, lorsque je dessine mes modèles, de respecter le style de chaque époque.

Coiffe sur tulle 1915-1920 (copie d’une ancienne)

Depuis maintenant quelques années, je suis capable de réaliser une coiffe de A à Z. Je dessine, je brode, je monte la coiffe et je l’amidonne. Je « travaille » principalement pour les filles qui dansent dans les Cercles Celtiques (danse traditionnelle), mais aussi pour des particuliers qui souhaitent compléter ou restaurer des coiffes de famille. Il m’est également arrivé de réparer des coiffes pour des femmes âgées qui avaient porté la coiffe toute leur vie et tenaient à leur coiffe favorite –surtout pour aller à l’église le dimanche-, mais aujourd’hui, il n’en reste plus guère. A défaut d’avoir pu confectionner des coiffes pour mes grands-mères, j’aurai toutefois eu la satisfaction d’en réaliser une pour les 90 ans d’une bigoudène en coiffe qui est toujours de ce monde. La dernière….

Coiffe sur tulle, fin des années 1930-début 1940, réalisation Nadine Chaminand. Photo © Studio Farzteo Photo

A suivre – Les étapes de la fabrication d’une coiffe, et comment les brodeuses s’y prenaient-elles pour copier les modèles (spoiler … la Messe jouait un grand rôle!)

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