Jean Littlejohn et Jan Beaney – voir le passé dans le présent

05/11/2019

Dans le monde anglo-saxon les artistes Jean Littlejohn et Jan Beaney sont très connues – mais peut-être un peu moins chez nous. Double Portrait !

En 1997, deux amies anglaises de longue date, Jean et Jan ont créé Double Trouble Entreprises pour promouvoir la broderie et ses techniques artistiques. Elles ont depuis participé à de nombreuses conférences, rencontres, salons ; écrit plusieurs livres et réalisé 4 DVD (www.doubletrouble-ent.com).

Jean Littlejohn et Jan Beaney
Jan Beaney, Transitions

Jan a d’abord suivi une formation d’enseignante en peinture et lithographie. Lors de sa dernière année elle découvre les arts du textile. Ce ne sont pas tant les techniques traditionnelles qui l’intéressent d’abord mais les appliqués, les couchures et la machine à broder à main levée. Pour elle déjà, la broderie sert à créer des toiles, et non juste un décor posé dessus. Elle apprend les techniques traditionnelles un peu plus tard puis les enseignera en parallèle avec d’autres médium.

Jean a commencé à broder à l’âge de 5 ans. Elle aussi a suivi une formation artistique pour devenir professeur mais d’abord au niveau des textiles. L’étude et la recherche des points de broderie traditionnelles et contemporains sont venus après, en parallèle à l’étude du dessin et de la conception artistique.

Jean Littlejohn – Taepas-Portal

Leurs processus de création sont assez similaires – dans le calme de leurs maisons où elles ont chacune un studio – elles laissent d’abord les idées germer puis prendre une première forme sur papier. Recherches, essais de matières et de techniques, l’œuvre prend peu à peu forme. Ce premier temps de création se fait toujours dans le silence. Une fois l’idée mise en place, les artistes accueillent volontiers un peu de musique, voire des films connus « dont je ne regarde que quelques scènes » (Jan) ou des livres audio (Jean).

Jan travaille souvent avec des tissus solubles qui vont disparaitre quand le tissu d’art aura été créé. Elle utilise aussi une machine à feutrer (ou machine punch) qui lui permet de fondre les points de broderie ensemble pour créer un nouveau tissu. Elle choisit aussi parfois de travailler sur du coton qu’elle teint et sur lequel elle pose des appliqués de tissu et des couches de points de broderie. La variété des points et des tissus est ensuite unifiée en une œuvre riche de surfaces et de profondeurs. Jean aussi travaille sur ces diverses couches brodées et cousues pour créer des espaces translucides où d’autres motifs sont perceptibles sous les premiers plans.

Jan Beaney – Cliveden-Winter-Vista

Il y a une recherche pour capturer, saisir, faire deviner le temps qui passe sur les choses et la nature. Ces couches superposées sont comme les années qui passent sur les objets et les souvenirs qu’ils nous ont laissés. Comme le souligne Jean « la machine à feutrer (embellishing machine) est essentielle dans mon travail et me permet de créer des contrastes entre flou et net qu’aucune autre technique me permet de réaliser ».

Jan s’inspire des paysages qu’elle voit près de chez elle ou lors de ses voyages pour « capturer l’essence d’un lieu – jamais une interprétation littérale ».

Jan Beaney – Cliveden-Long-Garden-Summer
Jean Littlejohn – Chinoiserie

Jean est fascinée par l’érosion du temps sur les choses – que ce soit les falaises du Dorset qui fondent dans la mer et révèlent les fossiles du passé, ou l’humble tapis mille fois piétiné qui raconte l’histoire de ses propriétaires à travers ses zones usées ou intactes.

Toutes les deux collectionnent des toiles, des tissus, des réalisations textiles du passé comme du présent. Pour Jan : Audrey Walker, Alice Kettle ou Louise Baldwin. Pour Jean, des pièces d’Inde, d’Afrique, de Moyen Orient ou d’Europe, en plus des artistes contemporains.
Jan ne peut jamais s’arrêter de créer, « sinon je suis en manque » ! Le plus grand plaisir de Jean est de « créer une tenture qui se développe autour d’un thème, d’essayer plusieurs versions, d’être complètement engagée par une idée ».

Jean Littlejohn – Odos-Moon

Lors de leurs expositions, il arrive qu’on leur demande si elles n’ont pas peur qu’on leur « vole leurs idées ». Jean répond : « Je ne saurais même pas refaire une de mes pièces, alors si quelqu’un veut essayer, bonne chance ! »

Un dernier mot de Jan : « Tout le monde peut dessiner. Il suffit d’apprendre à voir. Et même si vous êtes déjà bien avancé, prenez toujours le temps pour jouer et expérimenter. Ce temps-là n’est jamais perdu ».

Jan Bealey – Blue-Haze
Jean Littlejohan – Elizabeth’s meadow

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