L’étude de l’histoire de la broderie révèle que les brodeurs sont souvent inscrits comme professionnels ou illustrateurs de modèles, alors que les femmes ont un rôle plus ambigu. Elles sont souvent « reléguées » à un rôle d’amatrice, ce qui conduit à considérer leurs œuvres comme de moindre valeur. Les femmes de la haute société anglaise du 19ème siècle dépendaient presque exclusivement des hommes, de leur père, frère ou mari. Il était impensable que Sarah Bland (1810-1905) puisse travailler pour « gagner se vie ». Elle mettait donc ses talents au service de sa famille et de ses relations, à qui elle faisait des cadeaux.

Illustrations de fleurs de liseron prévues pour une broderie aux fils de soie E.372:81-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
L’artiste ayant un goût prononcé pour les dessins visuellement proches de la réalité, elle devait sûrement avoir en tête de réaliser cette broderie au passé empiétant.
Cet album de 366 pages contient des croquis dessinés ou collés sur une alternance de papier blanc et bleu. L’album a été rassemblé ente 1829 et 1834, avec des notes ajoutées jusqu’en 1854. Il est protégé par une couverture en cuir, ce qui dénote son importance aux yeux de sa propriétaire. Il est conservé au Victoria and Albert Museum, London

Broderie pour nappe E.372:39-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Ce motif a été offert à Sarah Bland par Lady Temple en 1835

Dessins pour broderie E.372:203-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Ce grand motif est destiné au décor d’un col. Les points de suspension indiquent que le motif doit être répété en miroir pour l’autre moitié du col. Au centre se trouve un monogramme, P.B, peut-être Prescilla Bland, la jeune sœur de Sarah.
On peut lire sur la première page : « S. Bland. St Leonards. 1836 ». Saint-Leonards (au sud de l’Angleterre) était un lieu de villégiature très apprécié au 19ème siècle. Avant l’arrivée du train en 1846, il fallait compter plus de 7 heures en diligence pour s’y rendre depuis Londres. La famille Bland y possédait une villa. La région était très appréciée des artistes. La peinte naturaliste Marianne North passait souvent ses hivers dans la proche ville de Hasting, tout comme le peintre William Henry Hunt.

Broderies pour ourlets de robes E372.304-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Comme toutes les jeunes filles de son époque, Sarah Bland savait manier l’aiguille. Mêlant ses talents de dessinatrice (elle est également connue pour ses illustrations botaniques très précises), Sarah Bland collectionne les modèles à broder en les recopiant de magazines (comme The Lady’s Newspaper), de publicités, de dessins reçus d’amis ou de connaissances.
Ces cadeaux montrent d’ailleurs les liens étroits entre les Bland et d’autres familles de marchands ou de banquiers comme les Barclay. Plusieurs des dessins portent ainsi les initiales de différentes personnes.

Modèle T.238-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Broderie réalisée par Sarah Bland. Laine, soie, perles métalliques, ruban, un large éventail de techniques et de matériaux pour broder des motifs géométriques, quelques fleurs stylisées et un exemple de dessin gothique.

Dessins pour poches de tablier E.372:67-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Dans ce très gros cahier se trouve des dessins prévus pour différents type de broderie : petit point, broderie de perles, décoration pour robes, cols, tabliers, chaussons, nappes, coussins, sacs, ainsi que des modèles d’alphabets et de lettres initiales.

Broderies pour bordures E.372.207-1967 ©Victoria and Albert Museum, London

Dessins pour broderie E.372:162-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Ce dessin est de A. Todt (1866), copié par Sarah Bland. Il s’agit d’un modèle pour la broderie de Berlin qui utilise la technique du canevas où les couleurs créent un effet de profondeur.

Dessins pour broderie E.372:35-1967 ©Victoria and Albert Museum, London

Dessin de broderie pour chaussons de femme E.372:171-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
On peut lire « Dessins pour chaussons de femme, taille la plus petite ».

Dessins pour broderie E.372:227-1967 ©Victoria and Albert Museum, London
Les angles droits de ces motifs indiquent qu’ils devaient être prévus pour des tabliers, des mouchoirs our des nappes. Les initiales E.P. sont insérées dans le motif.
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