La blouse roumaine de Florina – dernier épisode

07/05/2020

En août 2019, Florina Cismaru décide de confectionner une blouse traditionnelle roumaine, comme le faisaient ses ancêtres. Nous l’avons suivie tout au long de ses découvertes, de ses joies et challenges (Premier épisodeDeuxième épisode). Et aujourd’hui voici le magnifique résultat!

Interview et traduction Claire de Pourtalès

Délicats poignets © Florina Cismaru
La Blouse terminée © Florina Cismaru

Que ressentez-vous à porter cette blouse ?
Elle est très différente de ce que je porte tous les jours : elle me donne une personnalité. De plus, j’adore le toucher du tissu de chanvre sur ma peau : il sent l’herbe coupée ! Je la porte avec un jeans ou une jupe. Normalement la blouse fait partie d’un ensemble traditionnel, comme on l’a vu dans les articles précédents. Mais je souhaite la porter comme un élément moderne pour l’instant.
Maintenant j’ai vraiment hâte d’en créer une autre ! J’ai en tête une blouse de la même région mais avec une composition très différente (motifs, techniques, coupe). C’est aussi une blouse en forme de T-shirt, une tunique qui porte le nom de cămeșoi. J’ai commencé à faire des tests (voir dernière photo).
Les membres de l’Association Semne Cusute ont réagi très positivement – une personne a même dit que la blouse semblait très ancienne !



La blouse portée par la soeur de Florina © Florina Cismaru

Comment avez-vous travaillé l’assemblage ?
J’ai gardé la coupe traditionnelle, puisque ma blouse était basée sur une reproduction. Mais je l’ai adaptée à ma morphologie. J’ai aussi un peu changé la coupe des manches et celle de l’encolure. Enfin, j’ai ajouté un fil rouge, symbole de protection, autour du cou.

Que vous a apporté ce travail par rapport à vos origines ?
J’ai commencé à mieux comprendre la valeur du travail de mes ancêtres. J’ai eu l’impression de créer quelque chose de spécial ce qui m’a donné comme une sorte de connexion avec eux, comme un cercle qui ne s’arrête jamais. Un historien Roumain a dit que l’expression de l’art populaire, en plus de sa beauté, est en fait le seul art capable de nous donner des informations réelles sur nos origines. Ce sont les connexions les plus anciennes entre les civilisations, qu’elles soient spatiales ou temporelles. Je pense qu’il a raison.

L’encolure © Florina Cismaru
Motifs des manches © Florina Cismaru

Que vous a apporté les recherches faites sur les motifs ?
Je me suis rendue compte que la sémiotique est un très vaste sujet. Je ne prétends pas connaitre grand’ chose mais je peux reconnaitre certains symboles et signes anciens que j’ai vu dans les livres.
Par exemple, les bois de cerf est un très ancien symbole qu’on retrouve partout et pas seulement sur les tissus. Il signifie la force, le pouvoir, l’énergie. Il a aussi une mission apotropaïque (“qui conjure le mauvais sort”). On le retrouve dans beaucoup d’autres cultures. « Le Rhombus (une forme dont les 4 côtés sont égaux) est le symbole de la fertilité, du sol fertile. Les angles symbolisent la richesse de la vie. On retrouve ce symbole partout dans le monde préhistorique. Il unissait tous les signes sacrés. » Semnele Pământului, Virgil Vasilescu. Il est très fréquent d’associer les bois du cerf et le rhombus (souvent sous forme de losange).

C’est très intéressant de voir que les motifs ont tous un sens. Rien n’est laissé au hasard.
En Roumanie, on retrouve aussi très souvent le S posé à l’horizontal, le crochet, le bâton du berger. Mais ce sont tous des symboles connus dans d’autres cultures. Par exemples, les Gaulois et les Romains en décoraient leur maison pour se protéger de la foudre.
Merci Florina de nous avoir partagé toutes ces découvertes!

 

Florina: “Je voudrais enfin remercier Alina Panaite, une personne vraiment extraordinaire ; l’association Sewing Signs (Semne Cusute) sans laquelle tout ceci n’aurait été qu’un rêve. Je remercie aussi les responsables de la Collection ethnographique Gabriel Boriceanu: c’est une équipe admirable que je respecte beaucoup.”

Essai pour une future blouse © Florina Cismaru

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